Republié pour cause
de défaillance
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C’est en 2005 que le Musée Georges Pompidou organise une des plus grandes rétrospective que l’on ait consacré au mouvement DaDa, et à tous les artistes qui de près ou de loin s’en réclamaient.
Je me permets de publier ici les pages du catalogue qui fut alors édité par le Musée et qui représente l’un des plus beau travail qui ne fut jamais réalisé de mémoire de muséographe. À la fois chrono-logique et alphabétique, le livre retrace le cheminement d’une époque difficile puisqu’elle démarre un peu avant la Drôle de Guerre (14-18) et se prolonge un peu après.
De fait lorsqu’on étudie le mouvement DaDa on devrait toujours faire un parallèle avec deux autres mouvements simultanés, l’une en Russie avec le Constructivisme et l’autre en Allemagne à Weimar avec le Bauhaus. Trois attitudes, trois réponses différentes posées par les mêmes problématiques. Fins de régimes, montée de l’industrialisation, et crise de 29 annonciateur de bouleversements encore plus radicaux. Dans cette courte période de 1905 à 1920, le monde va basculer à l’est vers le bolchevisme et les idéaux d’un pouvoir populaire, au centre vers le nazisme avec les crimes humanitaires qu’on lui connaît.
Au centre de tout il y a la Suisse,
petit pays neutre et sans doute à l’abri, en toutes apparences des grandes révolutions qui jouxtent ses frontières. Et c’est là, dans une atmosphère plutôt bon enfant que naîtra le mouvement DaDa. Allez savoir, la bourgeoisie est capable de tant d’autodérision. Parce que là où la rigueur abstraite et à la fois construite des architectes du Bauhaus, là où les graphistes et photographes de la Russie née de la Révolution d’Octobre vont «changer le monde» et notre perception du monde, le DaDa va faire plus, il va installer le spectateur dans une transgression de sa perception.
Bousculer les lignes et les équilibres.
Renverser la gravité de la page et du sens des mots. Rien n’échappe au DaDa, poésie, graphisme, typographie, photographie, musique et arts plastiques. Chacune des expressions se retrouve non pas tête en bas mais «à coté». De coté si vous préférez. Histoire d’en rire ou de se moquer, histoire de provoquer, de déranger, de renverser les idées reçues. Mais alors que les deux autres mouvements vont procéder à une entreprise de démolition-reconstruction, le DaDa ne propose rien, ne reconstruit rien. La transgression pour la transgression. La transgression pour dénoncer, hurler contre l’absurde d’une société qui envoie ses enfants comme chairs à canon se faire démolir la gueule et le ventre. Transgression pour manifester l’angoisse des artistes devant le non sens d’un monde qui commence (seulement) une course effrénée vers la vitesse.
Plus vite, toujours plus vite.
Voici venir le temps des machines qui écrasent l’homme dans sa fragilité et l’artiste se révolte et envoie la typo, valser tête en bas ou de côté pour dire sa révolte d’artiste et d’homme… DaDa, Constructivisme et Bauhaus, c’est trois courants fondamentaux qui vont donc déterminer l’avenir de nos métiers, dont tous les graphistes un jour ou l’autre se revendiqueront.
Deux manières de consulter l’ouvrage ci-dessous.
Soit vous vous laissez embarquer par un déroulé en scrolling aussi long que magique de tout l’ouvrage, avec possibilité d’agrandir en cliquant sur chacune des pages, soit vous allez directement à la galerie ci-dessus pour prendre un aperçu plus général de l’ouvrage. Je ne crois pas que vous puissiez faire l’économie d’y passer du temps. Il est très rare de voir autant d’œuvres exposés simultanément avec nombre de légendes.
Avertissement
J’ai pris les photos à la volée, vite, en feuilletant moi-même ce catalogue pour votre plus grand plaisir et surtout curiosité. Si vous êtes enseignant, je ne peux que vous encourager de montrer ces pages à vos étudiants. Si vous êtes simple amateur, vous pouvez bien sûr «faire tourner» le lien de ce billet parmi vos amis, en revanche j’invite les lecteurs à ne faire aucun usage de photocopieur, pas plus que de faire commerce de ces reproductions. Leur usage est strictement réservé à l’usage pédagogique.
peter gabor | directeur d’e-artsup