Passion Jaoui à l’Européen | Les Photos

Agnès Jaoui hier soir au théatre de l’Européen, un moment exceptionnel, la révélation d’une immense voix, pleine d’émotion contenue. L’exactitude, la perfection, la justesse de chacune de ses interprétations, ciselées comme des bijoux ou des tableaux de primitifs flamands à la Van Eyck. Elle revisite les musiques latino, en espagnol, portugais. Salsa, flamenco, fado, tous les genres, le blues dans la voix et l’étincelle dans le regard. Je l’aimais déjà dans ses films et par ses films. Plus que jamais elle témoigne pour son «goût des autres.»

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Josef Müller-Brockmann sur le site de “eye”

Josef Müller-Brockmann: “je conseillerais les jeunes de regarder tout qu’ils rencontrent dans une lumière critique…” 

Alors je les inviterais à tout moment à prendre exemple sur Josef Müller-Brockmann individu-critique qui a été élevé à Rapperswil, Suisse. En 1914 et il a étudié l’architecture, la conception et l’histoire de l’art à l’université de Zurich et au Kunstegewerbeschule de la ville.  Il a commencé sa carrière en tant qu’apprenti concepteur et consultant en publicité chez Walter Diggelman et, avant, en 1936, établissait son propre studio à Zurich se spécialisant dans le  graphisme et la conception d’exposition et photographie.  Vers les années 50 il a été reconnu en tant que principal praticien et le théoricien du modèle suisse, qui a cherché une expression graphique universelle par une conception grille-base expurgée de l’illustration étrangère et du sentiment subjectif.  Sa série d’affiche "de viva de Musica" pour Zurich Tonhalle a été dessinée dans la langue du constructivisme pour créer un corrélatif visuel aux harmonies structurales de la musique.  Müller-Brockmann était fondateur et, de 1958 à 1965, Co-rédacteur du journal trilingue Neue Grafik (nouvelle conception graphique) qui a fait connaître les principes de la conception de Suisse internationalement, il était professeur de conception graphique au Kunstgewerbeschule, à Zurich de 1957 à 1960 et le für Gestaltung Ulm de Hochschule en 1963.  De 1967 il devient consultant européen de design pour IBM.  Il est l’auteur et l’artiste graphique pour la conception de Problems (1961), une histoire de Communication Visuelle (1981).  Il a contribué à beaucoup de colloques et a tenu des expositions individuelles à Zurich, Berne, Hambourg, Munich, Stuttgart, Berlin, Paris, New York, Chicago, Tokyo, Osaka, Caracas et à Zagreb.  En 1987 l’État de Zurich lui a décerné une médaille d’or pour sa contribution culturelle.

Voilà l’article que vous pouvez lire en «feuilletant» le site web de «eye»

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excellente source de réflexions et d’inspiration dont le rédacteur en chef fut et l’est toujours (je pense) Rick Poynor dont on a déjà évoqué plusieurs fois le rôle majeure dans la littérature professionnelle.

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D’autres méthodes que le b.a.-ba | soutien

Le 1er mars, j’ai publié une note concernant la lisibilité typographique (le permalink est ici).

Aujourd’hui un article vient de paraître sous la plume d’un collectif (Luc Bentz (école Pauline-Kergomard, 95 Sarcelles), Martine Castier (62
Helfaut),Annie Cobes (Ecole ouverte des Bourseaux, 95
St-Ouen-L’Aumône), Michel Colas (école Célestin-Freinet, 49
Saint-Lambert-du-Lattay), Sylvain Connac (Ecole coopérative, 34
Balard), Christian Deligne (école Pierre-Curie, 95 Pierrelaye),
Catherine Foucher (école des Charruaud, 33 Libourne), Isabelle
Lescouarch (école de Mont-Cauvaire, 76), Florence Suire (école des
Boulingrins, 95 Vauréal), Danielle Thorel (école Hélène- Boucher, 59
Mons-en-Baroeul).

 

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Il s’agit d’un texte qui nous rappelle le danger qu’un ministère autocratique décrète une pédagogie et ses modalités pour un sujet autant sérieux qu’irrationnel, l’apprentissage de la lecture. Dans mon article sur la lisibilité, l’histoire de la recherche montre bien, après avoir passé en revue les méthodes, les analyses, les moyens, que notre système œil-cerveau lit bien des mots voire des groupes de mots, et ce n’est pas en contradiction avec l’abandon progressif de l’apprentissage par la méthode globale. Parce que nous sommes là dans les méandres de l’irrationnel. On ne sait absolument rien sinon des théories, des hypothèses, mais non vérifiées du processus d’abstraction de la lecture.

De la maternelle à la grande école, l’être humain, vivant dans nos contrées de l’ouest dit évolué, suit un cursus d’apprentissage de la lecture dont les étapes, et la phénoménologie nous apparaît encore mystérieux. La méthode globale aurait eu pour conséquence de produire des générations de dyslexiques, l’orthographe a atteint le degré zéro de la dictée et les jeunes s’en sortent finalement mieux quand ils s’expriment par SMS ou e-mail où règne le fantasme des référents catégoriels : tendance, mode, look, identité sociologique… Là l’écrit rejoint le phonème et au diable l’encodage de la grammaire et de l’orthographe. Mais lorsqu’on retourne vers les notes prises en Fac ou les CV, lettres de motivations ou rapports d’entreprise on découvre très vite l’arbre qui cachait l’Amazonie, la jungle des mots mal transcrits. Les orthophonistes ne s’y sont pas trompés, et sous l’influence de groupes de recherche les enseignants petit à petit se sont arrachés aux modèles des «méthodes» pour tenter une autre aventure, celui de l’expérimentation au cas par cas. Dure labeur qui demande un investissement majeur de la part des enseignants. Qui voient donc d’un très mauvais œil le retour vers les directives ministériels qui décrètent que c’est comme ça et non comme ci. On sait tous que la lettre d’alphabet représente un son. Le B.A. BA paraît terriblement simple, mais ce qu’on ne sait pas c’est le tympo de l’apprentissage et les passages obligés de celui-ci. On ne sait absolument pas comment et en combien de temps nos synapses établissent un lien invisible dans notre conscience entre la représentation graphique d’un son, une lettre, et sa combinaison lorsqu’incorporée dans un groupe de signes, le mot. Bien sûr que bon nombres de spécialistes se sont penchés sur les schémas et la schématisation. La Gestalt nous fournit sans doute des réponses. Mais rien quant à la mesure de cet apprentissage, sur notre capacité à l’inscrire en tant que modèle scientifique de l’évolution de la lecture. C’est donc en toute conscience que je soutiens la déclaration du collectif qui a signé cet article dans Le Monde, pour alerter et contribuer à alerter les enseignants, les chercheurs et surtout les pouvoirs publics sur la nécessité d’une prudente temporisation dans cette affaire pédagogique. Laissez faire les enseignants, qui au contact du quotidien tentent chaque jour de comprendre ces phénomènes et d’adapter leur approche pédagogique d’une nécessité de résultats. Car c’est bien la seule chose qui compte. Et peu importe les moyens. Et si le ministère voulait bien revenir sur cette affaire de directive alors je me permettrai aussi de lui suggérer de mettre en place un institut de recherche national sur les questions relatives à la pédagogie de la lecture-écriture (à moins que cela n’existe déjà [mais ce lien nous renvoi sur des recherches. qui n’ont rien à voir avec le sujet]). Il n’est pas tant l’heure d’apporter des réponses que de mettre en place des méthodes de recherches qui posent les bonnes questions.

 

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Les orthophonistes démentent tout lien entre dyslexie et méthode globale

         

Article paru dans l’édition du Monde du 13.12.05

POUR justifier la suppression de la méthode globale d’apprentissage de la lecture, le ministre de l’éducation nationale, Gilles de Robien, a affirmé, dans Le Parisien du 8 décembre, que « les orthophonistes » l’avaient « alerté sur une véritable épidémie de dyslexie liée à cette méthode ». Faux, rétorque la Fédération nationale des orthophonistes (FNO) qui, avec 6 000 adhérents, constitue le principal syndicat représentatif de la profession. « Il n’existe à ce jour aucune étude menée par des orthophonistes, validée scientifiquement, mettant en évidence des liens de causalité entre méthodes de lecture et pathologies du langage écrit », indique la FNO.

Les chercheurs et les médecins le confirment. « La méthode globale n’a jamais créé la dyslexie », insiste Catherine Billard, neuropédiatre à l’hôpital Bicêtre et responsable du centre de référence sur les troubles des apprentissages. « Pathologie plus ou moins sévère, la dyslexie a des origines biologiques, génétiques et est donc antérieures à toute méthode d’apprentissage », dit-elle. Le neurologue Jean-François Demonet, directeur de recherche à l’Inserm, rappelle que l’apprentissage de la lecture ne constitue que « le facteur révélateur de la dyslexie, handicap biologiquement déterminé ». Mais, font-ils remarquer, le débat est « parasité par des considérations politiciennes » car « la méthode globale pure a été abandonnée depuis longtemps ».

Cette méthode, confirment les spécialistes, était « la pire manière d’apprendre à lire pour des enfants dyslexiques ». Du fait d’une incompétence souvent auditive qui leur fait mélanger les « fe » et les « ve », les « be » et les « pe », « ces enfants ont plus besoin que les autres du décodage syllabique », indique Mme Billard. Les travaux scientifiques menés depuis les années 1980 ont démontré que cette phase de décodage des mots était incontournable. Cela ne signifie pas pour autant qu’il faille bannir la méthode semi-globale pour tous les élèves. « Une bonne manière d’entrer dans la lecture est d’introduire temporairement l’idée d’une enveloppe globale des mots puis de passer au stade syllabique », indique M. Demonet.

Enfin, contrairement à ce que laissent penser les déclarations du ministre de l’éducation nationale, la dyslexie n’a pas progressé. « Il est délirant de dire que la méthode globale aurait développé une armée de dyslexiques », s’insurge M. Demonet. Si environ 15 % des élèves qui entrent au collège ont des difficultés de lecture, la population scolaire atteinte de dyslexie « varie entre 3 % et 5 % », affirment les spécialistes. « 15 % d’échec scolaire ne signifie pas 15 % de dyslexiques, il faut arrêter de «pathologiser˜ tous les enfants qui n’arrivent pas à lire », prévient Monique Touzin, orthophoniste au sein du service de rééducation neuropédiatrique de l’hôpital Bicêtre. « Il n’y a pas d’épidémie de dyslexie », martèle Mme Billard. Derrière les 15 % d’enfants qui ont un niveau de lecture largement insuffisant se cachent des problèmes plus larges. Ces élèves peuvent avoir «des retards mentaux, des problèmes psychoaffectifs, des difficultés socioculturelles, etc.», constate Mme Touzin, qui regrette que « l’on tire à boulets rouges sur les enseignants ».
                  Sandrine Blanchard

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Dulce Matias | photos au New Morning

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Dulce Matias est née et a grandi au Cap Vert, guidée par la musique. Elle est issue d’une famille de musiciens très influente au pays, comme son oncle John Matias dont la brillante carrière aura marquée toute la communauté. Enfant elle chantait les chansons traditionnelles à la maison avec sa mère, ses cousins et surtout avec son grand père Nho Xima violoniste très connu au Cap Vert.
Dulce a la musique et le chant dans la peau. Son timbre naturel est unique mais a aussi été perfectionné par le travail, discipline et rigueur. Ses modèles : Barbara Streisand et surtout Ella Fitzgerald, son modèle ultime car le jazz reste pour elle «la meilleure école pour éduquer la voix » et le blues « le rythme qui se rapproche le plus de la nostalgie qu’éprouvent les cap verdiens pour leur pays.» Très sensible au maintien de ses racines, de sa culture et de sa langue, Dulce a fait le choix de la musique traditionnelle. Alors Dulce chante la Morna, style musical le plus connu, dansée en couple, la Morna se joue à un rythme lent sur des textes nostalgiques exprimant la «saudade» le regret de l’amour perdu, de l’exil et l’espérance du retour. Elle chante aussi la Coladera jouée sur des rythmes plus rapides avec des instruments acoustiques (violon, guitares, cavaquinho). Cette musique exprime la joie de retrouver ceux que l’on aime après une longue absence. Pour cet album Mel ‘d Cana, Dulce s’est entourée de musiciens virtuoses et de Rufino Almedia alias Bau, connu pour son rôle déterminant auprès de Cesaria Evora.
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La Typographie, ça intéresse tout le Monde.

La typographie est universelle. 124 Pays différents ont déjà visité Design et Typo. Par delà une satisfaction narcissique, cela donne à réflechir. Un lieu de débat et d’analyse portant sur le design graphique, le signe et la typographie cela concerne tout le monde. Et internet est là pour nous rappeler comment l’invention de Gutenberg en son temps a du révolutionner le Quattrocento. L’imprimerie s’était propagé à travers tout l’europe, de l’Italie au nord de la Flandre, des confins de l’est (Hongrie) jusqu’à l’Angleterre. Un bon pied dans l’océan direction les Amériques. 1492-2006. Soit environ 514 ans se sont écoulés. Et aujourd’hui grâce à internet ce n’est pas moins de 124 pays du monde entier qui viennent visiter ce modeste blog. Et on n’y parle pas de sexe. Pas encore. Bon week-end à tous et merci de votre fidélité.

The typography is universal.  124 different Countries already visited Design and Typo.  UpOver a narcissistic satisfaction, that gives to think about.  A place of debate and analysis relating to the graphic design, the sign and the typography that relates to everyone.  And Internet is there to point out to us how the invention of Gutenberg in its time has revolutionized the Quattrocento.  Printing and Publication had been propagated through all Europe, from Italy in the north of the Flanders, the borders of the east (Hungary) to England.  A good foot in the ocean direction Americas.  1492-2006.  That is to say approximately 514 years were passed.  And today thanks to Internet it is not less than 124 countries of the whole world which comes to visit this modest blog.  And one does not speak there about sex.  Not yet.  Good weekend to everybody and thank you for your fidelity.

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les chiffres et le classement sont visibles ici

 

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Massin typographie la Cantatrice Chauve | Eugene Ionesco

En 1964 les éditions Gallimard publient un livre-théatre. L’auteur, Massin, directeur artistique des mêmes éditions (de 1958 à 1979) va consacrer plusieurs années à mettre en page, mais je devrais dire à mettre en scène une des pièces de Ionesco les plus surréalistes qui fût.

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La mise en page de Massin est le reflet fidèle d’une pièce aux situations et textes les plus absurdes. Le graphiste assista à plus de vingt représentations de la Cantatrice Chauve au théâtre de la Huchette en 1960. Il l’enregistra de même, pour en comprendre la moindre inflexion, les moindres silences. La typographie en tant que medium de transcription phonétique va lui permettre de représenter la scène et les acteurs dans toute leur spacialité. Les échanges, les dialogues prendront corps dans la taille, l’inclinaison, l’anamorphose, le rythme, les graisses, les contrastes, les blancs bien sûr… pour le silence.

Les anamorphoses lui posèrent des contraintes techniques incroyables. Les optiques de Cliché Union ne lui suffirent pas pour rendre compte des modulations innombrables de la voix des acteurs. Massin est mélomane, humaniste érudit. Mozart a peu de secret pour cet homme aux multiples talents. Ce faisant il ne trouva pas mieux que d’imprimer les textes à déformer sur des bouts de préservatifs (condoms) qu’il put triturer dans tous les sens, et infléchir les mots afin d’en rendre le sens de la manière la plus expressive possible.

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C’est avec un immense plaisir que je vous présente ici un court extrait de cet ouvrage aux niveaux de lectures multiples.

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Eugène Ionesco à gauche, Massin à droite. Photo de Yan Dieuzaide.

Ce qui me semble très intéressant dans la démarche de Massin, l’utilisation de la typographie et de la mise en page comme moyen redondant du texte écrit. En effet l’alphabet phonétique qui sert de support à la composition est déjà un moyen de transcription sonore d’une œuvre littéraire. Mais en ajoutant aux sons des lettres, des valeurs connotantes de la voix des acteurs, en transformant les mots en images sonores, il donne à entendre le texte de Ionesco comme si nous étions aux premières loges de l’orchestre. Massin a publié de nombreux ouvrages dont La Lettre et l’Image (Gallimard 1970), La Mise en Page (Hoëbeke 1991)…

pour voir cette rubrique d’ouvrages cliquez sur le lien.

Bibliographie complète d’Eugène Ionesco ici.

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Logotypes Histoire (1) | Franco Maria Ricci | Top Symbols & trademarks of the world

En 1973 le célèbre humaniste, designer et éditeur Franco Maria Ricci entreprit d’éditer une somme. Un recueil de tous les logotypes et symboles connus à cette date. L’aventure dura jusqu’en 1981, où il acheva (momentanément) cette magnifique édition avec le numéro 10 de ces albums. Cette édition est épuisée. Introuvable. Je l’ai cherché partout. La publication que j’entreprends est destiné exclusivement à l’usage pédagogique. Pour deux raisons. La première est évidente, c’est par l’exemple que l’on apprend aux élèves des écoles d’art graphiques, ce que fut la réflexion aux époques post- guerres sur les identités visuelles. Je renvoie le lecteur aux très sérieux articles de Michel Disles, cofondateur de Carré Noir qui s’exprime sur la question sur le site d’Admirable Design. Chaque création, a demandé de la part de leurs auteurs, designers, graphistes des semaines et des semaines de cogitation afin de dégager l’essentiel du signe qui allait «porter» une marque, la faire connaître et se reconnaître parmi les autre marques concurrentes ou non. La création de logotypes ne s’arrête pas dans les années 80, cependant il est à remarquer que les réflexions modernes sont infiniment plus empreintes de design-tendance, voire mode que de véritable pensée conceptuelle sur l’activité et la clientèle d’une marque (cf. mes articles précédents sur ce sujet). La deuxième raison est donc celle-là: à l’heure où la création d’identité visuelle, dépasse de loin les enjeux du logotype et du symbole, car inscrite dans un concept de communication globale, on a fini par oublier, souvent, pas toujours, la force, ou l’esprit que peut dégager LA MARQUE d’une entreprise. On a fini par oublier qu’un logo est avant tout une enseigne. Qu’il est censé représenter un métier, une activité, une clientèle. Nous continuerons à débattre de ces questions sur ce blog, et pour nourrir ce débat extraordinairement vaste, il me fallait publier ici même un pannel, le plus large possible de ces créations d’une autre époque. Chaque planche est copyrighté. Destiné exclusivement à une lecture sur l’écran et à seule fin de pouvoir faire évoluer la réflexion propre de chacun. C’est aussi un hommage que je rends ici à la profusion et la qualité de toute l’édition de Monsieur Franco Maria Ricci.

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La Mode mise en page | dans les ateliers de l’imprimerie Dreager | 1962-1964

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Le 15 septembre 1964, les ateliers d’impression Dreager Frères mettaient sous presse cette revue éditée par l’association de l’élégance masculine française. Collection automne-hiver 64.

 

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Recherches typographiques, anamorphoses (optiques).

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double pages stylisme

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hommage aux créateurs de mode mais aussi aux graphistes qui mettent en scène La Mode.

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Des photos qui ne sont pas sans rappeler nos collections styles de vie.

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Il est à remarquer que c’est depuis peu le triomphe des photographes. La couleur ayant apporté ce «supplément de vérité» qui permet à la mode de se confondre avec la réalité. Mais la typographie est présente. rappelant ainsi les principes de Roland Barthes pour qui (système de la mode) une photo sans légende est saturée de sens. Seule celle-ci peut amener la lectrice-consommatrice à l’acte d’achat.

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Mises en page monumentales, blancs tournants

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typographie minimaliste.

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Où l’on voit déjà le plaisir du jeu typographique. Cette petite flèche, ci-dessus, ça ne vous rappelle pas les jeux graphiques de Neville Brody?

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Pleines pages, graphisme vs photo. Les deux expressions contribuent à halluciner le spectateur pour l’étourdir d’une vision «hors normes».

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Ne soyez pas si surpris que ça. On découvre l’Amérique, ses légendes. C’est l’époque des John Wayne et d’Henri Fonda. Il y a là un clin d’œil à la française qui ne gâche en rien les structures rigoureuses de la mise en page. 4 col (1+2+1) juxtaposée à une page sur une seule colonne.

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Idem mais à l’envers, et la flèche qui occupe la première colonne renvoie bien l’œil vers les photos de la page de gauche. James Bond vient de sortir des studios de United Artistes.

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Photos détourées, textes en habillage, tout ceci composé en plomb, manuel ou monotype. Les détourages de chaque personnage, de chaque chaussure nécessitait des journées entière de retouches, de contretypies multiples et de montages manuels sur tables lumineuses.

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La diagonale dans les principes de mise en page, déjà initiée sous l’époque des constructivistes trouve ici un application au service de l’élégance et du dynamisme. La Mode, c’est ici et maintenant.

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Les typographes suisses ne sont pas loin. Ils se propagent en France (Hollenstein, Frutiger), en Allemagne, aux States.

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L’aventure de cette revue de mode avait commencé dès 1960.

 

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Mise en page épurée. Un semblant de transgression très sage (les filets oranges). On vend du rêve. Pas de la révolte.

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Où l’on voit la parfaite adéquation entre le damier de la course au service d’une mise en page rigoureuse et expressive. Le coup de crayon, c’est la course rêvée. On vend de la Mode, pas des voitures.

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Idem. Une scène d’un Américain à Paris. Le graphisme fait «avaler» tous les (mauvais) goûts, y compris cette chaise Louis quelque chose. Les filets à la Mondrian viennent soutenir avec complicité ces juxtapositions anachroniques.

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Des pantalons pour ne pas oublier qu’on était enfants… en pantalons courts.

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Là le graphisme fait le jeu du produit. Vous n’imaginez même pas le travail de photogravure que représente cette double page. Les logiciels Adobe? ils n’arrivent vraiment dans la production graphique qu’en 1993.

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Une double page que n’aurait pas renié Robert Delpire… en 1975.

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Là la mise en page joue sur les concepts. Chaussures et roues ne sont que les prolongements de notre corps. Et le graphisme permet de structurer une pensée qui émerge doucement de siècles de réclames «barbares».

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Il faut avoir osé, cette couleur parme-violette. Couleur cléricale par excellence, mais au diable la religion si ce n’est celle de la nouvelle société de consommation. On peut songer à une forme de transgression qui fait avancer le client vers le futur.

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Ce sont là les pages les plus simples mais qui nous rappellent que la mode commence dans les cartons à dessin. Dommage que les magazines d’aujourd’hui ne montrent pas plus la démarche du créateur. Car si la Mode est futile par définition, elle n’est pas pour autant inutile. Elle fait vivre des millions de gens dans le monde, depuis les filières textiles jusqu’aux bureaux de design et la distribution…

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Les blancs tournants dans la mode participent du principe de l’énonciation, du décret. Hors tout contexte, le vêtement devient un objet unique dont la seule présence photographique suffit à déclarer ce vêtement comme celui d’aujourd’hui. Du maintenant. Le vêtement détouré est hors du temps, hors de tout discours. Il est déclaratif. Impératif.

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Idem ci-dessus, à ceci près que l’on a mis en scène ce vêtement dans un univers coloré. Résolument futuriste. Vous souvenez-vous de David Vincent… Les envahisseurs en manches de nylon. La Matière est neuve et va révolutionner le temps conjugal (ou célibataire). Plus de repassage.

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Cette double page est assez extraordinaire. Aujourd’hui on trouve des DVD dans les magazines. En 1960, on insérait des échantillons de textile. Un façonnage sans doute très coûteux… Mais après tout, que vend la mode? Le textile et du rêve.

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Une photo pour finir, Le neuf et l’ancien. On ne parle pas encore de déchets et de développement durable. Le renouvellement du parc automobile est encore du domaine du rêve. Le photographe en plaçant ces débris au premier plan, ce petit garçon en bleu de chauffe en train d’admirer cette «Versailles» de la marque Simca, c’est le gosse de l’ouvrier qui admire le travail de papa. Peut-être qu’il l’emmènera faire un tour un jour. Non, un jour je m’achèterais cette merveille pour laisser les débris sur le bas coté.

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Il n’y avait pas moins de 100  graphistes, dessinateurs, maquettistes assis dans le studio  de Dreager et Frères pour dessiner, et créer les maquettes des clients. L’imprimerie se transforma en agence de publicité (Wallace et Dreager) pour déposer le bilan dans les années 80. Le directeur artistique en charge du studio en 1964. Monsieur Pampusac
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À découvrir le catalogue des vins Nicolas réalisé par Dreager Frères et Jean Latour avec le peintre Bernard Lorjou.

© design et typo | février 2006 |

Publié dans Typographie de magazine | Commentaires fermés sur La Mode mise en page | dans les ateliers de l’imprimerie Dreager | 1962-1964

Typographie en danger | cri d’alarme

Texte intégral d’un cri d’alarme paru dans Libération le 16 février dernier. Faites le circuler le plus largement possible et agissez si vous le pouvez !

Pour éviter sa dispersion, le patrimoine de l’Imprimerie nationale doit être valorisé. La typographie en danger

par Elisabeth BADINTER et Yves BONNEFOY et Roger CHARTIER et Jacques RIGAUD et TARDIEU Michel | QUOTIDIEN LIBÉRATION : jeudi 16 février 2006

Elisabeth Badinter écrivaine, Yves Bonnefoy écrivain, professeur honoraire au Collège de France, Roger Chartier directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, Jacques Rigaud conseiller d’Etat honoraire, écrivain, Bernard Stiegler philosophe, et Michel Tardieu professeur au Collège de France.

Les injonctions européennes ont soldé la guerre d’usure qui opposait depuis le XVIIIe siècle l’Imprimerie nationale aux imprimeries privées, celles-ci n’acceptant pas qu’une part des travaux lucratifs leur échappe. Sommée de se confronter aux réalités économiques et à la concurrence, l’Imprimerie nationale a été transformée en société anonyme en 1994. Elle a perdu de gros marchés, vendu une bonne partie de ses usines et son site historique parisien. D’un point de vue industriel, le groupe Imprimerie nationale SA n’est plus qu’une PME modeste et précaire. Si rigoureuses qu’elles soient, les règles européennes seraient cependant un bouc émissaire trop commodément désigné comme responsable du triste destin promis à un bien commun de valeur universelle.

L’Imprimerie nationale était, en effet, bien autre chose qu’une grosse imprimerie. François Ier fonda le corps des imprimeurs du roi pour favoriser la diffusion de la pensée. Richelieu créa l’Imprimerie royale, pour asseoir le pouvoir du roi, mais aussi pour aider le monde des lettres et des arts à rayonner dans toute l’Europe. A côté de sa production administrative, elle est devenue l’imprimerie du monde savant et du beau. Cela n’a été possible qu’avec la conviction permanente que, derrière les techniques d’impression, il y a la lettre, l’écrit. Il fallait conserver les poinçons qui ont servi à fabriquer les caractères de Garamond et des milliers d’autres pour être en mesure de les étudier, pour en dessiner de plus modernes ou pour en réaliser des interprétations numériques. Il fallait comprendre l’écriture chinoise pour graver les bois qui servirent à l’édition du Dictionnaire chinois-latin-français de Guignes en 1813. Sans cette typothèque unique au monde, constamment maintenue à jour et élargie, les études orientalistes n’auraient tout simplement pas existé. Ce sont ces activités, d’un poids économique pourtant bien faible, qui ont fait la réputation mondiale de l’Imprimerie nationale.

Un petit groupe de personnes et cette collection d’objets sont ceux qui pâtissent aujourd’hui d’un démantèlement presque achevé. Des mesures ont pourtant été prises : alors que les dernières activités industrielles de l’Imprimerie nationale sont pour l’essentiel rassemblées à Douai, le Cabinet des poinçons et l’Atelier du livre, trésors de l’Imprimerie nationale, et le personnel qui les anime ont été mis à l’écart dans une zone d’activités de la banlieue parisienne. Pourquoi ? Avec quel destin ? S’agit-il d’un lieu de stockage pour les centaines de milliers de poinçons, les presses et les livres classés monuments historiques ? Les uns sont sensibles à l’humidité, d’autres à la chaleur, tous sont fragiles… S’agit-il d’un musée ? Rien n’est prévu pour montrer, conserver, ces pièces ni en permettre l’étude. S’agit-il alors d’un musée vivant, où les élèves des écoles d’art pourraient venir apprendre les techniques anciennes auprès des derniers compagnons à les connaître ? L’exiguïté des lieux, le manque d’infrastructures physiques ou universitaires, l’interdisent. S’agit-il d’un atelier commercial ? Le marché est bien maigre…

La direction de l’entreprise a certes isolé son département patrimonial, mais pour en faire quoi? Elle a eu pour cela l’aval de sa tutelle, le ministère des Finances, dont relevait l’Imprimerie nationale pour des raisons historiques et non culturelles. Mais est-ce au propriétaire d’en décider seul ? Que font les ministères de l’Education nationale et de la Culture? Une pétition a pourtant rassemblé plus de 20 000 signatures, dont un bon quart hors de France. James Mosley, historien britannique et l’un des meilleurs connaisseurs de l’histoire de la typographie française, écrivait récemment : «Beaucoup peut encore être fait si la volonté existe. Si nous en laissons passer l’opportunité, les futures générations nous le reprocheront à juste titre.»

La France dispose d’un trésor, mais ne sait qu’en faire! Nous le regardons seulement comme un trésor du passé alors que c’est surtout de notre avenir qu’il s’agit. La typographie va bien au-delà du seul savoir des imprimeurs, qui d’ailleurs passe désormais inévitablement par l’ordinateur. La lisibilité de nos écrans relève de la typographie, la mise en page sur le Web ne peut se faire avec succès qu’avec des connaissances typographiques, la messagerie multilingue sur Internet (même via Unicode) est une affaire d’encodage typographique. On n’a pas su répondre à Google que la difficulté de la numérisation de toute la bibliothèque du monde n’est pas qu’un problème de droit ou de nombre total de caractères à reconnaître, mais aussi de compétence à situer chacun de ces signes dans un contexte linguistique, culturel, social et temporel que seule permet une connaissance approfondie de l’écrit, imprimé ou non.

La France dispose encore des savoirs relatifs à l’écrit, au livre, à la typographie et dispose aussi du mobilier (au sens archéologique) qui leur est associé. Elle dispose enfin d’écoles d’art graphique, d’universités et de lieux de recherches multidisciplinaires (l’école Estienne, l’EPHE, l’EHESS, l’ENST, l’Inria, pour n’en citer que quelques-uns), et de bibliothèques dont les livres sont à la fois moyens et objets d’étude. Des lieux et des structures d’accueil peuvent être trouvés. On peut notamment évoquer le site de l’ancienne imprimerie de l’Illustration que l’université Paris-XIII rénove et développe. Profitons de ces atouts conjugués pour créer un conservatoire de l’imprimerie, de la typographie et de l’écrit qui associera à l’entretien de biens matériels et immatériels les exigences de la formation, de la recherche et de la production. Ses missions s’étendront de la formation aux arts graphiques et à la typographie, à la recherche de niveau international sur l’histoire de la typographie, sur les pratiques d’écriture et le transfert de ces acquis dans les technologies de demain. Ses ateliers de production contribueront à la diffusion des cultures savantes, artistiques et techniques.

La difficulté n’est pas financière. Elle est de comprendre que ce melting-pot doit conduire à des approches multiples : artistiques, culturelles, historiques et techniques, résolument tournées vers l’avenir. Si une volonté existe pour surmonter les obstacles, l’agrégation de ces enjeux pourra se révéler riche de promesses culturelles et économiques.

Sans un projet ambitieux, quel sort risque de connaître ce patrimoine? On assisterait alors à une dispersion dans les musées européens de l’imprimerie des collections de poinçons et de matrices rassemblées depuis quatre siècles. L’Atelier du livre continuerait à décliner quelque temps dans son entrepôt perdu ; de départs à la retraite en démissions, le transfert des savoir-faire ne serait bientôt plus assuré. Au moment où la recherche internationale reconnaît la nécessité d’étudier des ensembles cohérents d’objets, une telle option irait à l’encontre de l’intention déclarée de requalification culturelle des instruments de techniques périmées. Ce serait là détruire d’irremplaçables archives qui permettent aux regards historiens et anthropologiques d’explorer toutes les dimensions sociales et symboliques de nos pratiques lettrées, dépassant largement le seul contexte français.

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Typographie | Les approches dans le texte | le gris typo en question

Le réglage des approches entre lettres nous conduisent naturellement à examiner les conséquences de ces variables sur la composition des textes. Approches horizontales, mais aussi approches verticales ou plus précisément l’interlignage contribuent à définir ce que j’ai appelé dans la note précédente «la couleur typographique» ou, si vous préférez le gris typo.

Nous allons examiner ces variables sous l’angle de quatre polices de caractère. L’Adobe Jenson, très belle Humane qui n’est pas sans rappeler l’ITC Berkeley, l’ITC Garamond, Garalde transitionnelle, le Meta Book du graphic-designer Eric Spiekerman et le Futura Book d’après le dessin de Paul Renner (1927).

J’ai pris ces quatre exemples parce qu’ils présentent une parfaite symétrie de problèmes dans leur anatomie:

Mais voyons d’abord les images. Cliquez pour agrandir et voir la typo à la bonne résolution:

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Forte disproportion pour le Jenson entre les hauteurs de cap et l’œil des bas de casses

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Faible différence pour l’ITC Garamond entre les hauteurs de cap et l’œil des bas de casses

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Forte disproportion pour le Futura Book entre les hauteurs de cap et l’œil des bas de casses

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Faible différence pour le Meta entre les hauteurs de cap et l’œil des bas de casses

Ces quatre polices de caractères focalisent la question que nous nous posons chaque fois que nous abordons la mise en page d’une publication. Petit œil ou grand œil, that is the question.

A corps égal, un petit œil me permettra de caler plus de signes dans une composition, mais c’est là une faible consolation si l’on songe que l’on perd en visibilité de la lettre. Je dis visibilité parce que la taille d’une lettre influe d’abord et avant tout sur sa visibilité c’est à dire sur la distance où l’œil peut lire confortablement une ligne de texte (voyez les planches d’opticiens & ophtalmos). Je ne peux comparer la lisibilité de deux caractères qu’à hauteur d’œil des bas de casse égale. Si tant est qu’on puisse parler de différences de lisibilité entre deux Garaldes ou bien entre une Garalde et une Linéale. J’ai toujours privilégié la notion de confort de lecture sur la notion par trop réducteur de lisibilité. Mais j’ai déjà publié plusieurs notes sur ce sujet et nous y reviendrons. Nous disions que sur le plan économique un caractère à petit œil me permet de gagner en nombre de caractères. Bien. Mais en agrandissant le corps d’une police à petit œil, afin de la mettre à égal niveau de celui à grand œil, je perds du coup cet avantage économique et doublement. 1) parce que je rentrerai moins de signes par lignes, 2) parce que je devrai augmenter l’interlignage en proportion de l’augmentation du corps.

Voyons maintenant la couleur typographique induite par les deux facteurs: les approches et les interlignages.

Les Approches : le Adobe Jenson

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Tout d’abord permettez-moi de m’excuser pour cete mise en forme un peu poussive mais le dispositif des blogs est assez contraignant lorsqu’il s’agit de faire ainsi une démonstration qui sur papier, dans une brochure à l’italienne par exemple permettrait de mettre en perspective les différences de gris typos.

Donc pour profiter pleinement de cette étude il vous faut absolument cliquer sur les images. Maintenant que remarquez-vous? Que vous composiez un texte en approche normale ou avec +20, +40 ou +80 unités additives, le texte reste tout aussi lisible. Les deux choses qui changent fondamentalement sont le gris typo, on va du plus foncé vers le plus clair, aérien, et le nombre de signes que vous entrez dans un espace contraint. Il va de soi que plus vous interlettrez plus vous diluez les mots-objets. Ce faisant le déchiffrage est plus délicat, parce que l’œil commence à percevoir les lettres au détriment des mots. Je sais que très récemment l’Éducation Nationale est revenue des méthodes d’apprentissage de lecture globale, mais on voit bien dans ces extrêmes (approche normale et interlettrage +80) que nous devons bien examiner la texture d’une composition au regard de la perception des mots tout autant que des lettres. Cela n’a évidemment aucune importance lorsqu’on interlettre des mots pour les logotyper, mais il n’en va pas de même pour un pavé de texte. Voyons maintenant les autres caractères subir les mêmes expérimentations:

Les Approches : l’ITC Garamond

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Approchestxtitcgaram_dApprochestxtitcgaram_e

où l’on voit bien que les mêmes effets produisent les mêmes causes. Plus on interlettre plus on fait disparaître les mots au profit des lettres, donc le sens même du texte. Et finalement une règle commence à s’imposer : dangereux de dépasser un interlettrage de 40 unités (dans InDesign). A 80 nous ne lisons plus que des lettres éparpillés dans un pavé de texte.

Même essais avec les deux autres caractères, le Meta et le Futura:

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Approchestxtmeta_dApprochestxtmeta_e

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Approchesfuturabook_d_1Approchesfuturabook_e_1

Vous avez cliqué sur les images, analysé la perception que vous aviez des pavés de textes. N’avez-vous rien remarqué? Curieusement mais pas tant que ça, tout ce que je viens de vous dire au sujet de l’éparpillement des lettres en approches +80, est moins vrai en Adobe Jenson et Futura Book, qu’en ITC Garamond et Meta Book. Cela tient à l’anatomie des caractères. Le fait est que d’avoir des disproportions importantes entre capitales et bas de casses augmente considérablement la lisibilité des mots. Et je ne parle plus des lettres. Mais des mots. Ceux-ci restent plus perceptibles en Jenson ou Futura parce que les futs des lettres montantes donnent une meilleure lecture de l’alphabet. Ils permettent la différenciation des lettres, donc du coup les mots restent plus cohérents. Je ne veux pas paraître prétentieux, d’autant que moi même j’ai cédé à cette mode des caractères à gros œil, mais je dois vous avouer que depuis les années 70, alors que Herb Lubalin et Aaron Burns installaient les nouveaux dispositifs de création d’alphabets en privilégiant l’œil agrandi des bas de casses, on n’a jamais fait réellement attention aux dégats que créaient cette mode sur des générations de lecteurs. Alors me direz-vous, y a-t-il des solutions pour contourner cette difficulté. Oui et nous allons voir dans les planches suivantes le rôle primordial de l’interlignage.

Les Interlignages :

Même expérience. Composition de trois pavés dans quatre caractères. Interligne compact (c’est-à-dire minimum par rapport à une composition en plomb), surinterlignage de 1,5 pt et surinterlignage de 3 pt. Nous allons voir que c’est là que réside la solution des problèmes de lisibilité. Pour comprendre le phénomène cette fois nous allons faire suivre les pavés de textes dont l’interligne est identique.

Interadobejensonnormal
Interitcgaramnormal
Intermetabooknormal
Interfuturabooknormal

Vous voyez tout de suite que ce que je vous disais précédemment se vérifie. L’Adobe Jenson et le Futura Book laissent filtrer les mots bien plus que l’ITC Garamond Light ou le Meta Book. Ah les gris typos sont beaux mais trop denses avec les deux dernières typos. Voyons maintenant un surinterlignage de 1,5

pt:

Interadobejensonsur1
Interitcgaramsur1
Interfuturabooksur1

Intermetabooksur1

Vous commencez à «sentir» le bonheur de voir vos yeux respirer autour des mots. La fatigue diminue et la rétine se déplace assez agréablement dans le texte. Mais ajoutez y  encore 1,5 pt et ce bonheur sera total :

Interadobejensonsur2
Interitcgaramsur2
Interfuturabooksur2
Intermetabooksur2

Et pour le coup nous pouvons revenir à nos études récentes de comparaisons entre caractères. Bien sûr que l’ITC Garamond et le Meta sont formidables d’élégance  et de modernité. Mais à condition d’être considérablement surinterlignés. Là nous retrouvons de la lisibilité parce que nos rétines n’ont plus tendance à décrocher des lignes et à se mélanger les pinceaux si vous me permettez cette trivialité. On peut même désserrer les approches sans trop perdre en lisibilité. Plus vous composez lache, plus il vous faudra surinterligner.

Ainsi donc nous venons d’examiner deux paramètres essentiels dont nous disposons tous sur nos logiciels de mise en page. Que ce soit dans Quark X-Press ou InDesign nous avons la possibilité d’accéder aux réglages les plus fins. Les valeurs d’approches que je viens de vous donner doivent être divisés par 2 au moins dans Quark parce que le logiciel comme vous avez pû vous en rendre compte travaille en millième de cadratin (le cadratin est un espace dont la valeur est égale à la hauteur du corps) alors qu’InDesign subdivise en 2000 ce même cadratin.

Mes conseils : avant toute mise en page, travailler la lisibilité des textes. Vous choissez une grille de mise en page, déterminant pour la largeur des colonnes donc pour la force du corps dans laquelle vous allez composer votre texte. En fonction de ce corps et de ce caractère (qui devra être choisi de sorte à éviter un trop grand nombre de césures) vous devrez faire des essais d’interlignage pour décider du meilleur rapport corps-approche-lisibilité. Pour les paramètres de compostion justifiée je vous invite à relire ma note sur les gris typos où je donne les valeurs de base (qui peuvent être adaptés selon les cas). Vous comprenez aussi la complexité de faire des compromis (le mot est laché) entre les impératifs économiques (de rentrer une quantité de texte dans une page) et les impératifs de lisibilité.

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