C’est durant un petit déjeuner dans le New Jersey entre 1975 et 1977 qu’Edward Benguiat un des plus grands créateurs d’alphabet de la fin des années 70 dût donner ce conseil à Woody Allen. Utilise donc le Windsor pour tes titres, ils sont très efficaces en Noir au Blanc, à la fois Jazzy et en même temps d’un grand classicisme… De fait, Allen a utilisé le Windsor, pour titrer Annie Hall, où l’on voit la première fois ce caractère mais encore en Noir sur fond Blanc. Puis il disparaît pour «Intérieurs» pour enfin réapparaitre dans Stardust Memories… Depuis cette époque Woody Allen, tel un parfait manager de Branding ne s’est jamais séparé de ce caractère fétiche, qui fut gravé pour la première fois en Angleterre par la fonderie Stephenson Blake (cf. les photographies ci-dessous qui témoignent de l’atelier de composition et des rangements des casses de la fonderie) puis vectorisé et numérisé par plusieurs fonderies indépendantes dont Elsner + Flake .
Pourquoi le Windsor ? ce caractère a quelques similitudes avec les caractères art-déco de l’époque… 1905, il illustre à souhait le double désir du cinéaste de choquer en permanence ses spectateurs tout en les séduisant. La délicatesse de la fonte, par ses contrastes, pleins et déliés qui la rapproche d’un Caslon des plus classique, associé à un tracé aux verticales cassées par des diagonales lui confère une allure à la fois désuet, moqueur et faussement institutionnelle. Il existait plusieurs variantes de la fonte, du Light Condensed à l’Elongated en passant par le Roman et le Light, mais très vite Woody Allen s’est fixé sur le Light Condensed sans doute pour des raisons d’élégance mais aussi d’économie d’espace. Le Light aurait «chassé» beaucoup trop.
Que dire d’Edward Benguiat? La première fois que je l’ai rencontré, ça devait être dans un meeting de l’ATYPI puis à New York où il m’invitait à déjeuner dans un de ces ‘restau’ italien qui jouxtait la 42e rue, où l’on dégustait des lobsters de la taille de mon coude… que dis-je, deux fois la taille de mon coude. Il m’entraina dans son minuscule bureau qui se trouvait au rez de chaussée de la Photolettering Inc. et me montra les ‘sketches’ de ces futurs caractères, dont le Benguiat gothic et sérif (ci-dessous la sérif). Il m’a raconté sa vie, ancien aviateur de la Royal Air Force, il émigra aux USA, devint dessinateur de lettres et finit par rejoindre l’équipe d’ITC d’Aaron Burns et Herb Lubalin , qui comptaient parmi ses meilleurs amis. Plus tard je le revis à Paris où nous déjeunâmes avec Paul pour évoquer nos projets respectifs. Un très grand moment de chaleur amicale. Pour ceux qui auraient oublié on lui doit entre autres, le Souvenir ITC, qui servit à composer les feuilles d’impôts de la République Française en 1978.
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sources de ce billet :
http://www.typemuseumsociety.org/SBatTM.html
http://kitblog.com/2007/12/woody_allens_typography.html
et un grand merci à Jonathan qui m’a mis la puce sur mon clavier.
C’est ça que j’adore chez toi : la mise en perspective de la vie des typos, qui ouvre toujours vers d’autres horizons.
Même si je suis fan de Woody Allen, je n’avais jamais pensé à cette permanence typographique.
Merci