Peu de temps après la publication de l’article que j’ai consacré à l’ouvrage de Jim, celui-ci m’envoya un e-mail pour apporter un éclairage qui permettra de corriger la perception que j’ai eu de son magnifique travail.
Je voudrais toutefois vous faire part d’un événement qui m’a forcé à prolonger le mois de relâche que je m’étais donné sur ce blog. Un accident de moto, trois côtes cassées et quelques contusions et déchirures musculaires m’ont littéralement «calmé» un mois de plus. Durant ce temps j’ai pu travailler, monter avec des amis une association (je vous en parle dans un prochain billet) mais pas plus. Pas de sorties, pas de blog, le moins possible d’informatique. Vous ne pouvez pas imaginer (sauf ceux qui en ont fait l’expérience), comme c’est difficile de respirer, tousser, rire et surtout dormir quand on a la cage thoracique un peu endommagé. Bref me voici doucement de retour et ne me dites surtout pas que je ne doive plus faire de moto ;-]. Faire simplement et toujours plus attention. C’est tout, c’est tout.
James Craig m’a donc envoyé un mail assez circonstancié, et pour être bien certain d’avoir compris l’ensemble de ses remarques j’ai pris un rendez-vous téléphonique et nous avons pu échanger et confronter nos points de vues. Pour l’essentiel, je dois le reconnaître, mon erreur de jugement venait de ce que je croyais que Designing With Type était destiné à des étudiants en arts graphiques 3e ou 4e années voire, dernières années d’études. Il n’en est rien. James voulait depuis longtemps commettre un livre qui s’adresserait à de jeunes étudiants à peine sortis du lycée (High School). Ils ne connaissent rien à la typographie, aux termes, à la grammaire élémentaire d’un métier aux pièges innombrables.
Et James avec la plus grande humilité s’est engagé dans une voie pédagogique des plus essentielle. Ouvrir le regard de jeunes bacheliers, oui, et on pourraît même imaginer que cela commence plus tôt, en seconde bien avant la terminale. L’apprentissage de la typo, de la mise en page, des rythmes de blancs, des espaces tournants, des codes d’élégance qui sont autant de fondamentaux, que chaque étudiant en arts appliqués devrait connaître avant de passer aux animations, aux expérimentations web et multi-media.
Mais voilà, ce n’est pas le cas, et il y a bien souvent téléscopage entre les programmes d’études et les désirs tendenciels des élèves. Je l’ai moi-même déjà vérifié. Et du coup le livre de J.Craig devient limpide. Pourquoi ai-je voulu comparer ce livre à celui de Karen Cheng. La fatigue, peut-être, l’impression que nous en étions au nième bouquin sur le sujet. De fait suis très heureux de pouvoir faire ce rectificatif de taille. Oui si cet ouvrage s’adresse à cette catégorie de jeunes émules des high school, alors il est remarquablement bienvenu. Et partout dans le monde. Parce que l’amélioration du design typo dans le monde entier est un besoin actuel et universel.
Designing With Type est un cours élémentaire de base, et du coup l’utilisation simplifié des polices de caractères, des exemples de composition, de l’anatomie de la lettre prennent tout leur sens. On ne parle pas aux spécialistes, experts en typo, en FontLab ou Fontographer. On ne cherche pas à séduire des professionnels avec des expérimentations décalées d’un Expérimental Jetset, bien que J. Craig aborde ces questions sur son website. Designing With Type trouve un prolongement des plus heureux ici sur les différentes galleries des meilleurs designers du monde entier.
ici une affiche de Philippe Appeloig…
Et voici quelques uns des artistes que James présente <on-line>:
Philippe Apeloig (5)
Michael Bierut (2)
Jean-Benoit Levy (5)
Chip Kidd (5)
Willi Kunz (5)
Rudi Meyer (5)
Paula Sher (1)
Nancy Skolos/Thomas Wedell (5)
Henry Steiner (5)
Wolfgang Weingart (5)
Et au fur et à mesure que l’on découvre le site on s’aperçoit qu’en fait James a mis quasiment son livre en ligne. Livre vendu, contenu gratuit sur le web. N’est-ce pas là la meilleure preuve que les «vieux» profs sont pas forcément les plus ringards. Regardons ce que l’on trouve à l’adresse du site.
Tous les items traités dans l’ouvrage sont là et Monsieur Craig fait le pari auquel je souscris à 100 pourcent que les élèves et débutants potentiels préféreront acheter le livre-papier pour l’avoir entre les mains, à côté de l’ordi. Mais aussi quelle meilleure publicité que de montrer très exactement sur l’écran ce que l’on va trouver dans le livre gutenbergien (refondu tout de même et heureusement pour l’interface écran).
Designing With Type (cinq années d’existence déjà) est le résultat d’un parcours d’enseignant durant vingt sept automne-hiver-printemps. «Comment veux-tu que je me souvienne de tous les noms d’étudiants» me dit James en éclatant de rire, allusion à ma remarque sur les <unkwnown origin> de certains travaux d’élèves…
Merci James de m’avoir essuyé les yeux, et de nous faire partager ta passion d’un métier qui ne s’est jamais démenti.
Et pour rendre un hommage encore plus fort à ce pédagogue hors normes, je vais avec son aimable autorisation publier prochainement les pages d’un de ses meilleurs ouvrages concernant la chaîne graphique du Print [Production for the Graphic Designer] avant l’arrivée du tout numérique. L’occasion de jeter également un pont transversal et vertical sur ces métiers qui ont connu bien plus de bouleversements qu’aucun autre métier au monde.