Le Design Motion à l’honneur chez PsyOp à NewYork City et L.A.
Qui suis-je pour déscerner un prix d’excellence à un studio de prod et de postprod à NewYork. En ont-ils seulement besoin. Je ne le crois pas. Et je suis ici dans mon bureau d’e-artsup à réfléchir sur les désirs d’avenir de nos jeunes étudiants qui ne rêvent que d’animation, de jeux vidéos et de superproductions comme WALL-E ou Avatar.
Mais avant que d’avancer plus loin dans cette réflexion, je voudrais que vous jetiez un coup d’œil à ces quatre films que j’ai sélectionné sur le site de PSYOP , et qui ont été tournés pour des pubs d’Häagen Dazs, d’Absolut, de Peugeot ou encore de Michelin.
Si vous voulez visionner les vidéos ci-dessous, téléchargez et installez le plug-in quicktime Perian à l’adresse suivante: http://perian.org/
Chacune de ces vidéos est un petit bijou de création… entendez par là d’inventivité, de sensibilité, de culture de l’image et même de culture au sens stricte, et aussi et surtout de perfection dans la réalisation. Prenez par exemple le design sonore, une activité artistique peu connue encore du grand public. Présent dans le process industriel comme dans les films ou émissions radio, le design sonore est un «acteur» majeur de notre plaisir de spectateur (ou d’auditeur). Déjà dans le film tourné par Wim Wenders pour Leica M8 vous entendez le déclic délicat de la bague des diaphragmes tout comme ici dans le film de Peugeot vous écoutez le son précis et doux à la fois du sélecteur d’assiette de tenue de route lorsque le conducteur arrive sur la route enneigé.
Le design motion c’est un ensemble de connaissances et de pratiques artistiques qui met en œuvre autant l’image, les effets spéciaux, la conception 3D et l’Animation que le dessin et la conception artistique de personnages et d’objets devant évoluer sous des angles cinématographiques parfaitement maîtrisées, afin de servir l’intensité de la narration. Le cinéma et les jeux vidéos ont inventé l’Animation (enfin, si on exclut les marionnettes), la Publicité a créé un métier, le Design Motion. Entre longs métrages et très courts métrages, les techniques sont les mêmes, mais la narration gagne en intensité par les raccourcis dans les films de pubs.
Mais revenons à nos futurs directeurs artistiques qui vont choisir de s’exprimer en animation. Je me bats contre toute spécialisation trop poussée. Contre toute idée selon laquelle l’on pousserait les jeunes à devenir juste «animateur» ou «codeur», ou encore et seulement webdesigners. Le designer motion se doit d’avoir une culture pluridisciplinaire qui lui donne une compétence sur l’ensemble des activités de communication ou d’«entertainment». Il a une culture de l’image, du graphisme, de la typographie. Il a une formation générale en dessin et en pratiques artistiques qui lui permet de créer les scènes d’une narration, précédés d’un solide storyboard afin de réaliser par la suite le composetting du film.
Pour quelles raisons j’oppose la formation Design Motion à celui de l’Animation? Tout d’abord parce que les fonctions économiques et sociales ne sont pas les mêmes. Un spécialiste en Animation va intégrer de façon temporaire des productions de films ou de jeux vidéos pour le temps de la production. Métier passionnant mais métier de la précarité tout de même. Saviez-vous que nombre de spécialistes en 3D travaillent sous le statut d’intermittants du spectacle. Un statut fragile o combien. Le Directeur Artistique en Design Motion va lui, intégrer une des nombreuses agences de communication qui sont en train de passer tous au «tout digital». Et pour ce faire il lui faut tout de même s’approprier les techniques de production, 2D, 3D, effets spéciaux etc. Mais il saura également prendre en main un brief client, et réfléchir comme un AD au génome d’une marque, et analyser la meilleure stratégie d’une narration qui saura communiquer l’essentiel sur un produit, un service ou une information institutionnelle.
L’AD en Design Motion trouve devant lui un marché immense d’entreprises qui sont en train depuis quelques années à se réveiller au monde merveilleux (humour et ironie) de la communication. Il bénéficie d’une autonomie créative et de savoir faire en réalisation qui lui permettra soit de faire (faber) lui-même, soit de faire réaliser ses idées par une équipe de spécialistes. Parce qu’il y a toujours des gens peu ambitieux, ou simplement peu désireux de s’investir à fond dans une culture aussi vaste que la création artistique.
Tendance lourde, les exécutants disparaissent de plus en plus dans tous les métiers.
C’est là l’un de mes leitmotivs des plus récurrents. Nous fêtons cette année les Vingt Ans de la naissance de Photoshop. Devrais-je ajouter que nous fêtons tout bonnement depuis septembre dernier les vingt ans de l’arrivée du numérique moderne. Or je ne sais pas pour vous, mais pour ce qui me concerne j’ai constaté durant ces années écoulées la disparition progressive de tous les petits métiers de la production d’images et de textes. Photocompositeurs, Exécutants, Monteurs, Photograveurs, Chromistes etc. Dans les domaines du Cinéma ou du Son, mêmes constats. Et aujourd’hui dans les domaines des effets spéciaux, idem. Pour exemple: dans les années 80, pour réaliser une scène du film Association de Malfaiteurs de Claude Zidi, où Christophe Malavoy et François Cluzet font modifier une série de boules du Loto Nationale dans un film TV, ils ont recours à une PaintBox de chez Quantel. Cet appareil permettait de retoucher et de remonter le film sans aucune trace de la supercherie. Il valait au bas mot dans les 456.000 euros.
Vous faites aujourd’hui la même chose avec un PowerBookPro à 2300 euros + un logiciel Aftereffects que vous achetez pour 2-3.000 euros (comprenant bien sûr tous les logiciels de production d’Adobe). Autant dire que l’appropriation des moyens de production dans nos métiers n’est plus un atout pour s’approprier une clientèle. Seul le savoir faire fera désormais la différence. Et dans la panoplie du savoir faire, celui qui travaille en amont de la création, celui qui conseille, qui crée, qui prépare le travail pour l’exécution sera toujours plus utile dans la mesure où cas extrême, il saura lui même réaliser ses idées au cas échéant. J’en conclus que pousser les jeunes aujourd’hui vers une ultra spécialisation revient non seulement à une supercherie pédagogique mais de plus est complètement criminel eu égard à leur avenir. Parce que l’avenir d’un métier comme le notre, à l’échelle de l’histoire se mesure en semestres, en mois, évenutellement en quelques années. Mais qui peut raisonnablement prétendre connaître les évolutions techniques et sociales pour les 40 ans à venir.
Autrement dit, je préfère former des créatifs que des exécutants car un Directeur Artistique qui a reçu une solide formation à la fois culturelle, artistique et technique digitale saura toujours faire évoluer une carrière, sans doute fragile, vers les opportunités les plus productives.
peter gabor
directeur d’e-artsup
Très bon article qui vient mieux définir ce métier qu’est Motion Designer que je pratique. Pourquoi le nommer ” Design Motion “? parce que dans les agences on parle de DA Motion Designer :)