Typographie de Gizmodo | une charte graphique inexistante

Je sais bien qu’en France tout le monde s’en fout de la typographie, non je blague, pas vous, puisque vous êtes, cher lecteur, en train de lire ce billet, mais examinez en cliquant sur l’image, chacune des versions du site de Gizmodo , célèbre blog de tendances high tech déclinée à partir d’une version originale américaine. Tout le monde semble utiliser le Verdana, très bien. Ceci posé lorsqu’on examine la grille des blogs en comparaison on s’aperçoit que selon chaque pays franchisé on n’a pas attribué les mêmes valeurs à la taille des images et textes.

Par pays et de gauche à droite, on trouve

le Gizmodo Américain

Une grille en trois colonnes, clairement établi où le texte de la col. du milieu est régulièrement distribué sur la même justification. Ce texte est composé dans un corps moins grand et légèrement surinterligné, que la plupart des autres versions et les américains n’hésitent pas à lui attribuer une couleur gris-bleue assez claire pour en réduire l’importance par rapport aux images. Car c’est bien les images qui présentent des nouveautés en avant première qui sont la vraie vedette de Gizmodo. Elles se suffisent pour susciter curiosité et engouement pour la découverte des objets les plus hétéroclites, utiles, inutiles, parfois très sérieux parfois totalement superficiels. La rigeur de la mise en page, c’est à dire les proportions maitrisées entre une justification unique des textes et une déclinaison des tailles d’images sur la pleine largeur du texte ou bien sur un tiers par exemple de cette largeur unique confère à l’ensemble une impression d’élégance controlée, de sophistication graphique qui traduit bien le discours de geek des tendances urbaines de ce monde totalement inconscient, qui fait mine d’ignorer qu’un enfant dans le monde, meurt toutes les cinq secondes, de la faim.

puis le Gizmodo Néerlandais

Soucieux d’une certaine rigueur les hollandais n’ont pas fait dans la sophistication. Ils ont comme les autres pays augmenté le corps du texte mais réduit l’interlignage, construit une grille en trois colonnes et attribué à toutes images la même justification. Cela donne une certaine austérité mais laisse encore la part belle aux images. De fait les textes fonctionnent un peu comme des légendes latérales assez confortables à lire.

le Gizmodo Allemand

Les Allemands n’y sont pas allé par le dos de la cuillère. Leur troisième colonne est insignifiante. Une colonne centrale très large, des images minuscules et le texte est composé toujours sur la même justification. On reconnait bien là l’esprit allemand et protestant qui n’attribue pas, en général, une grande place aux images. On retrouve cette attitude jusques dans la Presse quotidienne. Il suffit d’examiner un journal comme le Frankfurter Allgemeine Zeitung pour s’en convaincre. Sauf que dans le cas du positionnement de Gizmodo, la vedette ce sont les images. Les Allemands ont donc tout faux sur ce coup, nonobstant leur goût prononcé pour le sérieux-austère.

le Gizmodo Italien

Avec l’Italie on revient à la prépondérance des images. Mais l’espace reconstruit sur deux colonnes, est très mal géré. La taille des images varie selon le bon vouloir du rédacteur qui ne tient absolument pas compte d’une grille quelconque. On a bien introduit comme chez les Allemands des titres dans l’éditing des articles mais ils ne tiennent pas en une ligne. Ce faisant ça parait bien plus désordonné pour ne pas dire «bordélique» que la version Allemande. Le manque de rigueur, enlève toute sophistication à l’ensemble et l’on est en présence d’une dérive qui ressemble plus à un site marchand cheap style Surcouf ou Rue du Commerce. Difficile dans ces conditions de s’adresser à cette minorité de gens passablement fortunés qui ont les moyens d’acheter toutes les nouveautés inutiles de notre monde si merveilleux.

le Gizmodo Britannique

Même remarque pour cette version que celle ci-dessus pour la version Italienne. À ceci près que les images sont un tout petit peu plus petites et laissent une marge flottante plus confortable. Du coup la mise en page respirant mieux retrouve une certaine élégance. Titres de l’éditing également mal gérés tantôt sur une ligne, tantôt sur deux. Pas très heureux.

le Gizmodo Espagnol et enfin

La version Ibérique est presque une copie conforme de la Britannique. Rien à ajouter.

le Gizmodo Français

Quant à notre version nationale, elle utilise de même la grille des trois précédentes, à croire qu’il s’agit d’un template d’export unique pour les pays latins et exceptionnellement Britannique. L’éditing est de même mal maitrisé puisqu’on trouve des titres avec parfois juste un mot rejeté à la ligne suivante*.

Tout ceci pour faire cette remarque générale: quand on a la prétention de s’adresser au monde du luxe et des gadgets d’avant garde on devrait prendre la peine d’examiner les codes de mise en pages qui accompagnent cette volonté. Il s’agit une fois de plus de branding, de stratégie et de professionnalisme. Qu’en pensez-vous?

Liens Gizmodo:

http://us.gizmodo.com/
http://nl.gizmodo.com/
http://www.gizmodo.de/
http://www.gizmodo.it/
http://uk.gizmodo.com/
http://www.gizmodo.es/
http://www.gizmodo.fr/

*Pour Design et Typo j’ai également ce problème d’éditing que je dénonce chez les autres, à ceci près que je n’ai aucun moyen d’intervenir sur la mise en page du blog qui est verouillé de chez verouillé par la rédaction du Monde. On accepte ou pas. Pour ma part j’en ai fait un peu mon deuil :-) 

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0 réponse à Typographie de Gizmodo | une charte graphique inexistante

  1. giz404 dit :

    C’est le mot editing qui a du me faire penser au print.
    Effectivement, tu n’a pas parlé de print, mais j’ai fait le lien dans la mesure où nos outils de contrôle du texte sont un peu à la traîne pour ce qui touche au web.
    Cela dit, nous faut-il le même degré de contrôle ? Je ne le pense pas. Sur du papier, le lecteur n’a aucune prise. Si la mise en page est mauvaise, que peut-il faire ? Rien. C’est donc au graphiste de faire le maximum.
    Sur le web, l’utilisateur est roi. Le médium a été pensé comme ça. Les CSS sont adaptables (les feuilles de style utilisateur permettent de faire ce qu’on veut d’un site – visuellement parlant) L’adaptation aux différentes résolutions, (écran PC, téléphone mobile etc..) fait que notre contrôle (en tant que designer) sur l’aspect visuel reste limité.
    Ceci dit, je serais le premier à me réjouir d’une amélioration du rendu la justification avec les CSS, ou encore de l’intégration d’un système de césure…
    Par rapport à l’établissement d’une grille de contruction plus rigoureuse, je pense qu’effectivement il reste beaucoup à faire (mais les frameworks CSS aident énormément en gommant pas mal de petits détails techniques qui se révèlent souvent agaçants pour le webdesigner). Effectivement, les sites de journaux américains semblent en avance à ce niveau… espérons que les européens comblent l’écart.