Vu sur edito photo

Il y a des images qui s’ouvrent et d’autres pas, à notre imaginaire, à nos facultés d’interprétation. Cette église photographié à Bernac pris sous la neige fait partie de la première de ces catégories. Une prise de vue qui semble si simple, si imitable, si banale. Parce que prise de face, dans une conception parfaitement symétrisé, les seules lignes de fuites que le photographe s’est autorisé sont celles de l’escalier qui monte doucement vers la porte de l’église, fermée. De la neige tombée plusieurs heures auparavent. Immaculée, personne n’a foulé ces marches depuis la dernière précipitation.

Et au fond c’est sur ces principes simples que tout à coup notre imaginaire commence un travail empreint de liberté projective. Un mariage raté, un mariage manqué, un mariage en trompe l’œil ou bien le souvenir d’un être cher disparu auquel on vient rendre une visite  logtemps repoussée. Une distance aussi, celle qui nous mène jusqu’à la porte d’un lieu de prière, fermé. Provisoirement ou définitivement, qui sait. Mais une distance tout de même, celle qui nous mène jusqu’à la confession d’une mémoire défaillante qui soudain se cristallise sous cette neige immaculée, qui n’attend qu’une chose, les traces de nos pas qui vont ou qui reviennent sur nos pas. Une photo simple, mais pas tant que cela, parce que le photographe en saisissant l’essentiel d’une scène a volontairement ouvert nos réflexions vers les abîmes de nos souvenirs, de nos espoirs ou regrets. L’escalier vous l’aurez remarqué nous invite vers une montée, en pente douce jusqu’à cette porte fermée que l’on aimerait voir s’ouvrir à notre approche. Mais peut-être, sans doute qu’elle ne s’ouvrira pas, et la neige immaculée est là pour nous rappeler l’absence de toute visite, de toute présence, de tout accueil chaleureux. Il n’est plus temps de se souvenir, il n’est plus le temps des regrets. Juste de constater une distance entre un temps révolu, un temps qui n’est plus celui de l’espoir de lendemains fleuris, parce que la neige a enfoui toute parole, tout rêve et que la porte restera fermée alors même que nos pas ne nous mèneront jusqu’en haut des marches pour ne pas subir, encore et encore une porte fermée. Voilà une photo, voilà une photographe dont je vous invite à visiter son blog et ses photos ici.

Bernac

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