Conforama | BNP Paribas | Bouygues Telecom | Eulia | Banque de Bretagne |Groupama | Total
Pour ce qui me concerne il y a un nouveau logo, La Poste, que j’envisage bientôt d’analyser, à l’instar de celui de la SNCF ou du LCL (du «Le Crédit Lyonnais»). Cependant par curiosité je suis allé regarder de plus près l’agence de design (A&Co) qui a commis ce re-lookage exceptionnel, et j’y ai découvert quelque chose d’assez curieux.
Voici quelques logos tous issus de la même agence:
(cliquer sur l’image pour faire défiler les logos)
Pour les initiés vous l’aurez compris, une seule agence, plusieurs clients prestigieux, un seul et même geste calligraphique pour décliner l’identité de toutes ces marques. Je n’ai jamais vu un tel mépris du client et des clients du client. Toute ma vie j’ai appris qu’un graphic designer se devait d’analyser une marque, son histoire, ses fondations, son positionnement, son projet d’entreprise, son devenir. Ce qui fait de chaque logo intelligemment conçu est une œuvre unique et adaptée exclusivement à cette marque. Je me permets de vous renvoyer sur l’excellent site d’Etienne Mineur, graphic-designer et consultant en identité qui nous livre là quelques unes de ses réflexions brossées au vitriol.
C’est la première fois de ma vie que je vois qu’une agence décline inlassablement un seul et même gestuel quelque soit l’univers socio-économique de ses clients. Le palmier de Conforama, les oiseaux de BNP Paribas, le bonhomme de Bouygues Telecom, la Banque de Bretagne, la griffe calligraphique de Groupama et pour finir le symbole de l’atome nucléaire de Total1 ont tous été dessinés sur la même tablette wacom, avec le même numéro de référence d’Adobe Illustrator et/ou Photoshop, par sans doute la même main, fort adroite sans doute, mais terriblement répétitive et ennuyeuse. Nous sommes arrivés à l’ère du logo permutable acheté sur catalogue de chez Surcouf. Un grand merci au passage pour tous les graphistes qui se sont donné tant de mal durant les cinquante dernières années pour dessiner des objets uniques, représentants symboliques d’entreprises soucieuses de se faire un nom dans l’univers impitoyable du commerce et de l’industrie. Ce que cela prouve? Les entreprises n’ont plus beoin de logotypes, mais juste d’analystes financiers pour faire des bénéfices sur les économies d’échelle. Il n’y a d’ailleurs plus d’entrepreneur, mais seulement des actionnaires. Et quelle merveille de vouloir faire participer les salariés à leur propre destinée, ainsi à l’heure des licenciements collectifs on fait jouer le syndrôme de Stockholm. Le tableau de Picasso serait presque parfait. On n’a plus besoin de logo, on n’a plus besoin de salariés, des machines? pourquoi faire, il y en a tant en Chine. Et l’oiseau voudrait s’envoler mais le voilà empêtré dans un couloir qui n’est pas le sien, parce qu’au carrefour de la rue Clignancourt, un ingénieur astucieux des ponts et chaussées à cru bon de croiser les couloirs de bus avec ceux des manants. Paris devient illisible. Tout comme ces logos qui ne veulent plus dire grand chose, puisqu’on ne peut s’y identifier, puisque permutables. Ah l’année finit bien et je salue au passage un autre site qui tente de nous redonner une lisibilité sur les actus politiques, juridiques et sociologiques, Versac: vous y trouverez peut-être les réponses aux questions que je me pose. Bon réveillon à vous ! et Champagne pour tous.
1 beau contresens puisque tout le monde a voulu y voir un symbole planétaire, alors qu’il apparaît clairement pour moi qu’il s’agit de la représentation d’un atome [autrement plus provocateur de la part de Total, une des entreprises considérées comme les plus polluantes de la planète]
Réponse aux commentaires:
Je suis entièrement d’accord avec vous. Les questions que je me pose finalement c’est de savoir si ce manque de cohérence dans l’accouchement des logos qui impliquent bien les responsabilités partagées entre clients et agences ne préfigure pas la fin d’une époque. Les stratégies de comm. qui impliquent la création de nouveaux logos semblent considérer l’acte comme une anecdote dans le process de communication globale (anecdote je nous l’accorde plutôt onéreuse). Ils n’ont pas forcément tort mais du coup le logo n’est plus le sujet principal d’une stratégie, ce qui en diminue la portée et l’investissement graphique qu’on lui accorde. Et pour le coup on assiste à la montée d’une économie des logos prêt-à-porter à 200$ où chacun peut pour une somme dérisoire décliner une identité permutable. (Il suffit que vous entriez Logo dans ©Google et vous voyez…). Je ne dis pas que l’expertise est facile à mener, mais elle est indispensable… bataille rude entre clients et agences, si ces derniers veulent conserver leur place dans ce process. Le meilleur exemple que j’ai pu donner sur ce sujet reste le logo du Le Crédit Lyonnais, qui à ce jour n’est toujours pas décliné de façon nationale (ou internationale) dans l’archi des succursales, faisant cohabiter l’ancienne enseigne avec la nouvelle marque qui figure comme une PLV dans les vitrines de la Banque. Une PLV, c’est un peu réducteur ne trouvez-vous pas?
C’est le matraquage visuel
à moindre frais, celui qui rapporte le plus de fric à l’annonceur qui compte en payant le moins possible à un soi-disant éventuel “graphiste”… mot ô combien galvaudé à notre époque !